Courtney, débranche, débranche !

par Adehoum Arbane  le 24.03.2020  dans la catégorie A new disque in town

Le merchandising, ce grand merchand loup ! Bienvenue dans l’industrie des produits dérivés qui semble avoir gagné le monde feutré et respectable du rock. Et il y a de quoi trembler ! Rendez-vous compte, en plus des rééditions, des coffrets collectors, des lives pirates ou officiels, des t-shirts, des tote bags, on trouve l’unplugged, figure quasi imposée depuis Nirvana. On s’en souvient, ça passait sur MTV et la prestation était même sortie en disque. Avant eux, Bon Jovi et Clapton avaient assuré le coup, surtout Clapton avec une version à nu de Layla qui avait eu le mérite de faire (re)découvrir quel compositeur il était réellement.

C’est sans doute d’ailleurs l’essence même du concept de l’album unplugged, au traitement acoustique moins cyniquement opportuniste qu’on ne l’imagine. Salutaire, il aura permis à Nirvana de montrer que sous l’armure grunge vibrait un cœur pop. Cobain était d’ailleurs fan des Vaselines et bien avant des Beatles, de Bowie, du Crimso même ! Le type avait de cette crédibilité qui fait baver le quidam. Revenons à l’unplugged. Derrière l’idée de se débrancher, il y a celle de se réenraciner. De retrouver une forme de simplicité qui fut de tous temps à l’origine du plus petit projet pop. À la base, une chanson existe à l’état embryonnaire de démo. Puis viennent toutes les techniques d’enregistrement, de production et d’arrangements qui en font un corps augmenté. Attention, il faut pourtant se garder de crier à l’authenticité. Les morceaux de Nirvana joués ce 18 novembre 1993 ont bénéficié d’un traitement particulier, à commencer par la guitare électro-acoustique de Cobain à laquelle s’ajoutent un accordéon et un violoncelle. Pas vraiment le dénuement. Malgré tout, l’idée est bien de donner une nouvelle vie à des chansons que l’on connait bien, parfois trop. Depuis, d’autres ont suivi et pas des manchots : Metallica, Neil Young, Macca etc. Nous arrivons en 2020. Espoir du rock australien, Courtney Barnett a quelques galettes derrière elle, pour autant elle a choisi de se lancer dans l’exercice pas trop casse-gueule du MTV Unplugged. Elle enchaîne avec une certaine désinvolture qui est sa marque de fabrique, les vieux morceaux et les créations récentes. Aucune prise de risque à l’horizon, le résultat se voulant assez classique, pour ne pas dire académique. Les chansons sonnent comme celles de Nirvana en leur temps. Barnett s’est coulée dans le moule Cobainien. Comme son glorieux ainé, elle tente les reprises pointues (Charcoal Lane, Not Only I) et celle hyper iconique de Leonard Cohen, le très beau So Long Marianne. Avouons-le, elle ne s’en tire pas si mal tant le titre parait indépassable. Là aussi, le violoncelle fait beaucoup comme du temps de quatuor d’Aberdeen. Façon lettres de noblesse pop. La vraie surprise de cette performance parfois ronronnante – Courtney étant  faite pour l’électricité – tient dans la relecture au piano de Nameless Faceless. On en perd son latin. Mais la chanson finit par marcher, même si elle frôle parfois l’oraison funèbre. 

L’idée vraiment intéressante de l’unplugged est de reconnecter avec l’émotion brute d’une chanson jouée comme ça, à la cool, entre copains. Cette captation, pour louable qu’elle soit, ne tient pas toutefois cette promesse même si elle possède son charme, ses moments de grâce (Depreston, le long crescendo de So Long Marianne et l’inédit Untitled Play It On Repeat) et de folie douce (Nameless Faceless). Maintenant, on attend Courtney Barnett au tournant, celui du troisième album, manière de rassurer et de la retrouver telle que nous l’aimons : en avatar féminin et ronchon de Neil Young. Allez Courtney, rebranche ! 

Courtney Barnett, MTV Unplugged, Live In Melbourne (Marathon Artists)

 

https://www.youtube.com/watch?v=uDSSbMqpUhY

cover1.jpg

Photo : Mia Mala McDonald©

 

 

 

 


Commentaires

Il n'y pas de commentaires

Envoyez un commentaire


Top