So What, the fucking song

par Adehoum Arbane  le 15.07.2014  dans la catégorie A new disque in town

Et si Avi Buffalo donnait, un temps, raison à l’effroyable logique de l’IPod : ne conserver dans nos playlists interchangeables qu’une chanson, une seule ? Telle est la vocation temporaire de So What, premier extrait de leur futur et très attendu deuxième album, At Best Cuckold. Pas tant parce qu’il s’agit de l’unique chanson à se mettre sous l’écouteur, donc un choix par défaut. Bien que pour le moment solitaire, So What est une invitation à épier la sortie du Lp. Bien que sage, voire même classique dans sa formule, So What possède cet esprit parfaitement addictif qui vous hèle à chaque fois que vous vous en éloignez. Optant pour une trame mélodique à la guitare que n’aurait pas renié Sonic Youth, So What relève de l’évidence, couplets et refrain s’enchainant merveilleusement, preuve du savoir-faire de Avigdor Zahener-Isenberg, leader et songwriter. Petit miracle d’écriture, cette entrée en matière de trois minutes et vingt-trois sacrées secondes sent bon l’été qui s’annonce. Mais chez Avigdor, la saison en question se pare de nuances acidulées, parfois délavées. Il y a dans la musique du jeune homme – les chansons du premier album éponyme en attestaient déjà – une dimension adolescente mais jamais mièvre, quelque chose renvoyant à l’esprit délicatement tordu d’un Larry Clark mélancolique et assagi. L’été californien de So What se joue plutôt sur les tremplins bétonnés des skateparks cerclés par les highways ou du côté des campus déserts, quand la houle juvénile s’est retirée pour aller vivre pleinement son âge en vacances sur des plages blondes bordées de bleu. On parle parfois de College rock et ce terme, pour réducteur qu’il soit, convient pourtant très bien au rock tragicosmique de Avi Buffalo. Ainsi va So What qui s’ébroue dans un torrent solaire qui pourrait être le rouleau d’une vague à Long Beach. Espiègle et sauvage – la guitare qui n’a jamais peur de s’étirer en tempétueux soli –, la musique d’Avi Buffalo n’en finit pas de rêvasser et il faudrait plus d’un été pour arriver à en faire le tour. Aussi et certainement parce qu’elle a oublié d’être idiote ou futile : derrière la mélodie parfaite que l’on entonne le matin sur le chemin de l’école, les paroles elles transpirent la sincérité, se racontent en chroniques d’une vie faite d’amours déçus, de nostalgie poignante et d’enfance pas encore perdue. Ces sentiments doucement chaotiques, on les retrouve évidemment dans le single, sur le visage poupin de son créateur mais aussi dans l’imagerie sans dessus dessous de la pochette de At Best Cuckold. Comme si ce nouveau matériau jouait les shakers pour mieux bouleverser nos âmes, pour les faire valser au son de ces dernières turpitudes électriques. Cohérence enfin d’un groupe qui eut la chance de se faire repérer par le mythique label Sub Pop, fin connaisseur en matière de rock bravache et de tristesse contemporaine comme en témoigne son plantureux curriculum vitae aux brillantes signatures : Nirvana, Mudhoney hier, Shins, Iron & Wine, Fleet Foxes, J Mascis aujourd’hui. Pour cela on se repassera en boucle So What sans moue interrogative mais avec une expression jouissive, celle qui suit une amitié renouée. Quatre ans après leur premier essai, Avi Buffalo revient plus en forme que jamais, avec des étoiles filantes plein les yeux, des refrains plein les poches et la même honnêteté. Intacte, inaltérable, aussi solide qu’un roc… k. 

Avi Buffalo, So What (Sub Pop)

At-Best-Cuckold-Avi-Buffalo.jpg

https://www.youtube.com/watch?v=XCbDsVUjKVs&feature=kp

 

 

 

 


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