L’art de TRIOMPHE était au Baron

par Adehoum Arbane  le 12.11.2013  dans la catégorie A new disque in town

Le Baron. Réduit feutré pour yuppies flippés. Avant même qu’une faune au parfum fauve n’investisse les lieux comme des financiers carnassiers, j’y ai fait, je dois l’avouer, l’une des plus singulières rencontres. Un Frédéric Chopin Mitch Mitchellisé, un bassiste au visage de piéta et au corps drapé de smoking tout deux accompagnés d’un guitariste Phil Lynott dans ses habits de Beatles. Un beau diable comme je le constaterai plus tard. Alors que le groupe procède aux derniers réglages, la foule des invités s’amasse mollement, corps vautrés dans les canapés rouges, bustes recroquevillés au bar en attente d’embarquement pour un voyage qu’ils ne soupçonnent même pas. En attente d’une bière ou d’un alcool plus traitre d’abord. Un bras masculin vient s’apposer contre une épaule féminine dans un geste d’appropriation sentimentalo-capitaliste, signe presque ineffable, invisible, que le groupe peut commencer à jouer. Il s’exécute, ENFIN. Des lumières pourpres baignent leurs visages, expressions concentrées, regards pénétrés par l’exigence d’un art que nos esthètes maîtrisent à la perfection. Car - et c’est le premier point positivement tangible de ce set - comment arriver à retranscrire une musique qui semble n’avoir été conçue que pour le format cd ou vinyle si ce n’est par l’obstination, la croyance en la technique, la foi dans les réflexes de l’homme parvenant à dompter les foudroiements de son instrument. Charles-Baptiste, Alexandre Chatelard et Cédric Le Roux sont sur scène comme ils sont dans la vie. ILS EXISTENT. Donnant corps à chacun de leurs titres dont les patronymes renvoient tous à une époque bénie, un âge d’or d’innovation et de mutations que, semble-t-il, nous ne parvenons pas à reproduire aujourd’hui. Sauf d’un strict point de vue pop. Printemps, Alpine, Concorde, Andy Amoureux et Bagatelle déclinent leurs thèmes immédiats sans jamais s’arc-bouter sur leur partition. Chaque morceau se forge une entité live, analogique mais en même temps organique. La virtuosité et la passion geek des trois musiciens y est sans doute pour beaucoup. Quand vient Pavane, nous sommes projetés en piste dans une danse imaginaire, un slow non pas avec une version rajeunie de Sophie Marceau – trop chiante, trop facile – mais plutôt avec son amie dodue, l’électrique Pénélope que l’on rêve alors de déniaiser élégamment. Le synthé EP30, millésimé 74, équipé du premier clavier avec sensitivité du toucher paraît avoir été imaginé pour cette vision de pure sensualité à la moiteur trouble. Un solo vient alors déchirer l’instant en un orage d’apocalypse douce, c’est précisément le son que Cédric Le Roux obtient avec sa guitare Ampeg en plexiglas surgi de l’année 1969 ô combien érotique. Le groupe enhardi par ces sentiments confus enchaîne sur Roman, autre ballade climatique labellisée TRIOMPHE. Puis vient un Mirage qui n’a rien – non rien – d’une illusion. La puissance de la composition est bien réelle qui rappelle les grandes heures de Camel dans un mood prog médiéval transfiguré d’éclairs futuristes. C’est le climax du répertoire discographique en devenir et sans doute celui du concert. Ô apothéose, Rothschild ajoute à cette liste impeccable et resserrée un classique de plus, morceau dont la puissance au propre comme au figuré achève de briser la salle pourtant conquise, toute secouée par ces tourments amoureux traduits in extenso en musique. Quand le Baron laisse se fracasser sur la porte de sortie le reflux bramant de l’auditoire, les faux hipsters costarisés déboulent en un jeu de quilles humanoïde et par trop inconséquent. Ils sont littéralement passés à côté de l’événement. C’est historique et nous y étions. NOUS. Les autres peuvent toujours se morfondre dans leurs chorégraphies mimées sans grâce ni conviction.

TRIOMPHE (Ekleroshock)

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