Cream, benjamins de la pop

par Adehoum Arbane  le 07.12.2006  dans la catégorie C'était mieux avant

C
e XIXe siècle avait 4 ans lorsque Benjamin Disraeli vint au monde. Le romantisme prenait son essor. William Blake noircissait les premières pages de Milton, épopée poétique et visionnaire. Beethoven composait sa Sonate pour piano n° 23 en fa mineur, opus 57. Le siècle était en marche. Thomas Jefferson devenait Président des Etats-Unis d’Amérique pour la seconde fois et Napoléon se faisait sacrer Empereur des Français à Notre Dame par Pie VII.

Mais revenons à Benjamin Disraeli. Le premier comte de Beaconsfield est un jeune homme cultivé, conscient de ses possibilités, rêveur et ambitieux. À vingt ans à peine, il promène  son romantisme là où son inspiration le guide, parcourant les paysages immémoriaux de l’ancienne Europe, aux Pays-Bas, puis de l’autre côté du Rhin. Son appétit est puissant, il spécule, s’effondre puis se relève, perd de l’argent, jamais l’esprit, lance un journal et écrit… Beaucoup…  Avec son cœur… Puis, il repart comme avide de conquêtes et de reconnaissance. On le croise en Italie.

1831. Dépression puis voyage au Caire, l’homme est fasciné par l’orientalisme lascivement couché dans les toiles de Delacroix et qu’il tente alors de restituer dans un étrange brassage des influences. Transi, passionné, il écrit alors à un proche : « Nous sommes tous fait pour le soleil brillant de l’amour ; c’est le principe même de l’existence et sa seule fin. »

Mais l’existence est parfois un monde de douleur : son compagnon de voyages William Meredith meurt subitement. Le jeune homme blessé, à vif, n’est pas encore rompu comme le brave Ulysse aux épreuves amères qui malmènent les destins en brouillon. « Ne prends jamais la mauvaise direction » se dit-il alors, comme s’il exhortait les fantômes de la Mélancolie à fuir. La vie est une fuite. Perpétuelle. Une danse de derviche tourneur qui dure jusqu’au petit matin, mourant alors dans les affres de la Rêverie, où les filles de joie s'extasient sous des arcs-en-ciel barbus. Benjamin Disraeli sillonne le globe. Constantinople, Alexandrie, Corfou, Malte se souvinrent longtemps de ce nom qui se façonna au gré des escales.

1837. Le romantisme agonise, il n’en a plus pour longtemps, 10 ans tout au plus. Le pragmatisme est de rigueur. Benjamin Disraeli se décide à entrer en politique. Son cœur se gonfle d’ambitions nouvelles. Il défend le protectionniste de la perfide Albion et dans un élan suprême se hisse à la tête du parti Conservateur. Puis en 1868, il devient Premier Ministre de la Reine Victoria. Juste retour des choses. Là où d’autres se noient dans la lésine et l’erreur, Benjamin Disraeli installe la splendeur décadente de l’Empire Britannique, construit une politique coloniale forte et offre Chypre aux Anglais.

Il meurt le 18 avril 1881. On entend au loin, vers ces cieux inconnus que pointe alors Big Ben, les lamentations de la Mère Patrie. 1881. Puvis de Chavannes offrait à la postérité Le pauvre pêcheur et Picasso dessinait ses premiers cris.  Le siècle était mourant.
 
Cream, Disraeli Gears (Reaction-Atco)
 
disraeli-gears.jpg
 
http://www.youtube.com/watch?v=kLx44oEr-jE
 
 
 
 
 

Commentaires

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08.12.2006

Détail amusant : malgré son titre à l'évidence univoque, de Benjamin Disraeli il n'est en fait pas question ici...

L'histoire - la légende - veut que le titre ait été soufflé à Clapton (ou Baker) par un roadie alors qu'ils discutaient... vélo.

Le roadie vantait les mérites des "derailleur gears" de son vélo mais prononçait le premier mot, certes un peu difficile, d'une façon toute personnelle... "Derailleur" sonnait comme "Disraeli" et c'est cette version, adjointe au "Gears" ("vitesses") originel qui fut retenue pour un titre psychédélique à souhait...

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carcamousse

09.12.2006

BRAVO! Si, si, bravo!

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