Dungen, pop suédée

par Adehoum Arbane  le 24.03.2006  dans la catégorie A new disque in town

Autrefois…
... Les Vikings étaient hirsutes, violents, belliqueux, volontiers braillards, soiffards, violeurs, équarisseurs. Bref, ils ne faisaient ni dans la dentelle, ni dans la sobriété. Aujourd’hui, nos vikings sont toujours blonds, mais derrière leurs moutonnantes chevelures se cachent les charmes ondoyants d’une musique qui ne doit plus rien à la corne de brume.

Nos bardes nordiques sont suédois et se prénomment Dungen. À leur tête, Gustav Ejstes. Je sais c’est aussi insupportable qu’imprononçable. Nous l’appellerons donc Gustav. Ce doux-dungen fut élevé au folk éthéré par l’entremise des plus hautes instances paternelles. Cet héritage plane de façon diffuse. Car disons-le, les influences sont multiples. Dungen serait l’improbable rencontre entre des guitares hendrixiennes croisant le fer avec des flûtes et des violons empruntés pour un temps au collectif baba allemand, Amon Duül II. Vous ajoutez des claviers jazz, la folie du Group 1850, une production floydienne et une rythmique qui doit autant au hip-hop qu’au son psyché rock des excellents Pink Fairies. Mixez, malaxez tout cela et vous obtenez Ta Det Lugnt, une sorte d’objet sonnant (sonique) non identifié.  Et c’est justement ces parentés hautement contrastées qui confèrent à l’ensemble une force peu commune. Ta Det Lugnt est le voyage et le Vallhala en un seul disque (le quatrième en l’occurrence).

Combi Folkswagen avec très bel espace à l'intérieur.
Ce baba ô rock-barnum-maëlstrom vaut d’être vécu, comme toutes les expériences psychotrip. Mais attention ces sympathiques Suédois ne sont pas là pour nous offrir une bonne tranche de rigolade. Si l’on passe la première écoute (l’usage de la langue natale peut prêter à sourire), on y découvrira des trésors de mélodie. Et si l’on pousse le vice psychédélique jusqu’au bout, on y trouvera la révélation mystique. Ces 13 morceaux composent une odyssée homérique, aux frontières de l’espace et du temps. Au début, c’est franchement pop et à mesure que l’on progresse en terrain inconnu, on se noie dans une transe où les guitares se taillent, dans le gras symphonique, la part belle. Parfois, claviers et mellotron ruissellent en fines pluies d’été, les flûtes striant l’azur du matin comme les rayons du soleil. Certains morceaux, courts, prolongent délicieusement cette veine bucolique. Ces petites vignettes, interludes baroques, déploient leurs chorales instrumentales : orgue de messe, piano frêle, cordes aigrelettes, guitare soyeuse. D’autres ouvrent des voies (des voix aussi) plus hard, où les ruptures de rythme favorisent l’installation crescendo de climats plus dramatiques. Les 3 derniers morceaux referment ce grimoire mirifique sur une épopée planante qui n’est pas sans rappeler A Saucerful Of Secrets du Floyd. fuzz granuleuse, distorsion ascensionnelle, mellotron crimsonien, basse gluante et batterie épileptique en sont les principaux atours.

Chapelle Sixties.
À ce stade-là, peut-on parler de revival sixties ? Difficile à dire tant le groupe a su digérer ses classiques pour livrer une œuvre cohérente, originale, puissante et inspirée. Notre quator nordique arrive largement à se hisser jusqu’aux plus hautes (strato)sphères de la création musicale actuelle. Mieux que des vikings, des Kings !

Dungen, Ta Det Lugnt (Subliminal Sounds)

8628393.jpg


 

 


Commentaires

Il n'y pas de commentaires

Envoyez un commentaire


Top